Chapitre 5 : SEPARATION
« Bonsoir ma puce. Dors bien »
Emilie sourit et m’adresse un tout mignon :
« Au’voir, pahpa »
Ma petite fille chérie saisit son doudou de la main gauche et enfonce son pouce bien profondément au fond de la bouche, roule sur le côté et me tourne le dos. Je devine qu’elle se chatouille le bout du nez à l’aide de l’étiquette de la peluche.
Ouf ! Ce soir nous allons pouvoir souffler. Les garçons sont chez leurs grands-parents et le couché des filles s’avère plus facile qu’à l’habitude. D’ici quelques minutes, nous aurons la soirée devant nous et nous pourrons peut être en profiter pour regarder un film ou une série. Depuis l’arrivée des jumelles, nos journées sont pour le moins remplies. Deux ans et demi déjà. Sortant de la chambre, je tombe nez à nez avec Bérangère qui vient de tirer la porte derrière elle. Ses traits sont tirés. Elle n’en peut plus cela fait des mois que je m’en fais pour elle. Elle s’éloigne de moi. Je le sens mais elle refuse d’en parler. J’ai abordé le sujet à plusieurs reprises mais les réponses furent à chaque fois des faux fuyants.
Je la prends dans mes bras et pose un baiser sur sa joue.
« Ca a été avec Léa ?
- Oui, sans problème. Elle est très calme. Me répond-t-elle le regard perdu dans le vide. Et avec Emilie ?
- Tout pareil : sans problème ! Elle aussi est à bout. Que veux-tu faire ce soir. Regarder un Son’s of anarchy ? Un film ? »
Délicatement, elle s’échappe de mon étreinte et déclare :
« Je ne sais pas. Avant toute chose, je prends un bain et ensuite on verra.
- Ok. Je t’attends en bas. Tu réfléchis et tu me diras »
Un nouveau baiser sur sa joue. Je descends les escaliers quatre à quatre et me dirige vers le bureau. Msn. Conversation avec des potes. Cinq minutes se passent dix peut être. Quelque chose me chiffonne. Je veux en avoir le cœur net. Je remonte au même rythme. Je ne perçois pas un bruit. D’un pas rapide je me dirige vers la salle de bain. Un frisson, une intuition me glace le sang. D’un geste vif, j’ouvre la porte.
Elle est assise, nue, dans la baignoire vide, les bras passés autour des genoux. La tête enfoncée entre les jambes, en silence, elle sanglote. Malgré mon entrée fracassante, elle n’a pas esquissé un geste.
Je fais deux pas et m’agenouille près d’elle. Je passe ma main dans ses cheveux mi-longs et le haut de son dos vouté. D’une voix que j’essaie de remplir d’autant de douceur que je le peux, je lui glisse :
« Ma douce, que se passe-t-il ? »
Ses sanglots redoublent. Je vois qu’elle essaie vainement d’émettre des mots mais seuls des sons incompréhensibles sortent de sa bouche. Je la serre contre moi. J’ai compris mais j’ai besoin qu’elle le formule. Je pose mes lèvres sur le haut de son crâne. J’attends qu’elle se reprenne. Je ne suis pas pressé, le moment viendra bien assez tôt.
Finalement, elle prend une grande respiration et lance d’une traite :
« Je crois que je ne t’aime plus. »
Je ferme les yeux. J’essaie de retenir les larmes qui affluent. Je presse ma joue contre sa chevelure. Mes bras l’enserrent encore plus fort. Je retiens un sanglot et lui chuchote à l’oreille :
« Si c’est le cas, il faudra que tu me quittes »