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Une romance pornographique
16 novembre 2015

Chapitre 7 : CHIARA

19 Août 2012, 17h30

Je sors de ma voiture. Je suis nerveux. J’ai rendez-vous avec Chiara. J’aurais voulu repousser  encore une fois cette rencontre.   J’appréhende plus que tout cette soirée : mon premier rendez-vous galant depuis plus de seize ans mais aussi la première rencontre avec cette créature numérique qui d’un seul coup de sonnette magique va devenir matérielle et perdre par la même occasion tout son mystère.

Peut-être le charme va-t-il se rompre et nos contacts s’arrêter net. C’est pour cette raison que trois fois j’ai postposé ma visite. Il en faut plus pour décourager une femme telle que Chiara. Elle est revenue à la charge et  m’a insidieusement fait comprendre qu’il était grand temps que nous nous voyons sans quoi nos échanges cesseraient.  J’avais cédé : quitte à rompre la magie autant le faire sciemment que par maladresse.

Nous ne nous sommes encore jamais parlés. Hier, après avoir échangé nos numéros, nous avons appelé la boîte vocale de l’autre. Ces appareils électroniques déforment les sons, sa voix sera-t-elle aussi pure et son ton si enjoué que ce que j’ai entendu hier ?

J’ai l’impression que nos nombreuses conversations  m’ont tout appris d’elle. Quotidiennement, durant trois mois, nous nous sommes échangés deux, trois voire quatre email d’au moins une page A4 Même s’il est difficile pour moi de l’admettre, je pense que je suis déjà amoureux de cette âme: J’ai  été conquis  par cette belle plume qui m’a fait découvrir un esprit cultivé doté d’un brin de malice,  de beaucoup d’humour et  d’une once de coquinerie … 

Je connais tout de son passé depuis son enfance à ce jour : sa relation difficile avec des parents trop rigides, sa bonne entente avec sa sœur, son mariage catastrophique avec un homme manipulateur qui la maltraitait, le bonheur que lui procuraient les  deux enfants nés de cette union pathétique,  les péripéties de son divorce, les hommes qui avaient croisés sa route depuis et surtout sa relation passionnée avec Pierre qui à mes yeux ne vaut guère mieux que son ex-mari.

Dès le départ leur histoire n’avait été que ruptures rocambolesques suivies de réconciliations tumultueuses, infidélités mutuelles et disputes en tout genre.

Cet officier de carrière, de quinze ans plus âgé qu’elle, elle me l’a décrit comme un homme cultivé, protecteur et généreux. En revanche, il peut  aussi se montrer bourru, manipulateur, égoïste et paternaliste. Il n’a certes  jamais été agressif et certainement pas posé la main sur elle mais, il l’a toujours traitée comme une enfant incapable de la moindre décision sensée. De nombreuses fois, il l’a rabaissée en public ou carrément évincée de sa vie sociale, souvent il l’a humiliée devant ses propres enfants et elle ne compte plus les manques d’attention ou les attitudes déplacées. 

Au-delà de tout cela, il l’a surtout entrainée dans ses fantasmes libertins et poussée à adopter des pratiques sexuelles qu’elle n’apprécie guère. Elle s’y est pliée pour ne pas le perdre voire pour maladroitement renforcer  leur union. Elle a admis avoir pris un immense plaisir dans le fait de pouvoir tester, sans aucune limite ni interdit, son pouvoir de séduction. Elle adore faire naitre le désir dans les yeux des mâles et les pousser jusqu’à leurs derniers retranchements.

Pour lui convenir, ces jeux auraient dû s’arrêter après la parade amoureuse seulement, ce n’était pas le cas et ils se partageaient l’un l’autre pour le plus grand plaisir de monsieur.  Ces partages étaient douloureux pour elles, pas tant le fait de s’offrir à un autre mais le fait de voir son amour jouir avec une autre.

Mais Pierre c’est aussi l’homme qui lui a permis  de quitter son époux. Pour cela elle lui vouait une admiration sans borne et se sentait probablement redevable. Elle a eu du mal à imaginer sa vie sans cet individu qui l’avait extirpée d’une vie faites de coups et lui avait permis de se reconstruire… dans les limites du cadre qu’il lui imposait. Car elle le savait, tout n’était pas rose dans leur monde. Elle sait qui ils n’auraient jamais pu être réellement heureux ensemble et qu’elle n’aurait jamais été comblée en vivant à ses côtés.

Pour moi, cet homme, n’est rien de plus qu’un jardinier malade cultivant, greffant et ligaturant un arbrisseau abîmé en vue de lui donner la forme torturée dont il rêve. Il façonne cette femme comme l’on modèle un bonsaï .

Leur histoire s’est achevée brutalement, en mai, quand Chiara  a découvert qu’il la trompait une nouvelle fois. Elle a  rompu tout contact et  décidé de tenter de vivre sa vie sans lui.

Tant de discussions, tant de mails et, à présent, seuls une porte et un coup de sonnette me séparent de cette chimère qui a envahit mes pensées. Un bouquet dans une main, une bouteille de vin dans l’autre, je vérifie rapidement mon allure dans le reflet d’une fenêtre.  Une grande respiration, un coup de sonnette … La porte s’ouvre… Un « Bonjour » lancé d’une voix suave emplie de chaleur et de joie de vivre. Telle que je l’imaginais. Directement suit un rire cristallin. Oh que ce rire est doux. Un énorme sourire barre mon visage. Ce moment restera à tout jamais gravé dans ma mémoire : devant moi se teint une nymphe que dis-je une déesse incarnée !

De toutes les femmes que j’ai pu croiser dans ma vie, aucune ne rivalise en beauté avec cette silhouette frêle emplie de grâce. Un visage fin couronné d’une chevelure châtain clair finement relevée de quelques mèches blondes, de grands yeux bruns capturant la lumière et ne la relâchant que pour mieux vous éblouir. 

«  Entre. Ne fais pas attention, je suis très en retard, je n’ai pas eu le temps de me changer ni de terminer le ménage.

-          Veux-tu que je repasse un peu plus tard ?

-          Non, non, reste 

-          Comment vas-tu ? »  lui demandé-je un peu intimidé  et à court d’idées pour lancer la conversation.

« Je vais bien, je te remercie. Je suis très en retard et n’ai pas eu le temps de me changer avant ton arrivée mais tout va bien. Me répète-t-elle en rougissant légèrement.

-          Tu es parfaite telle que tu es ne t’inquiète pas pour cela.  

-          Oh ! tu es trop gentil ou trop indulgent.

La fixant dans les yeux j’ajoute :

« Ni l’un ni l’autre, juste réaliste.»

Elle sourit et  détourne le regard, puis reprends en se dirigeant vers le salon : 

« et si nous regardions directement ses vêtements ? »

Ces vêtements d’enfants, c’est le prétexte qu’elle a trouvé pour me faire plier et  me faire venir chez elle. Comment refuser de venir chercher des habits inutilisés et presque neufs ? Ses enfants, Alain 10 ans et Eline 12 , n’en ont plus l’utilité et les miens plus jeunes de quelques années pourraient leur donner une seconde vie.

Rapidement nous jetons un œil sur les différents sacs qu’elle a préparés. Je la remercie en précisant que je les embarquerai en partant. Nous reprenons le cours de nos discussions et développons des sujets que nous n’avions qu’effleurer dans nos mails. Nous dérivons d’un sujets à l’autre sans répits ni silence gênant. Elle commence à s’affairer pour préparer le repas. Elle n’arrive pas à se concentrer : elle retourne dix fois au frigo, y oublie son couteau, s’arrête en plein milieu d’une tâche pour en commencer une autre. Je m’aperçois qu’elle fuit mon regard. Elle s’essuie régulièrement les mains. Elle rit pour un rien presque nerveusement.

On dirait que je l’impressionne. Cela me plaît. C’est même une véritable aubaine pour le timide maladif que j’ai été. Je suis à l’aise, très sûr de moi. Je m’amuse à faire fuir son regard dès que je le peux. Je la taquine gentiment. Je joue avec son trouble.

Au bout d’une éternité, nous nous installons sur la terrasse pour déguster ce plat si difficile à dresser. Nous nous retrouvons face à face, elle rougit. J’aime cette situation.

Nous discutons frénétiquement sans voir le temps passer. La nuit est tombée depuis longtemps lorsque je me dis qu’il serait temps que je rentre. Je n’ai pas envie de précipiter les choses. Je ne vais pas l’embrasser. Je vais lui proposer de se revoir.

« Mon dieu, il est déjà passé une heure. On bosse demain, il est temps que je prenne congé.

-          Il est déjà si tard ? s’étonne-t-elle. Je n’ai pas vu le temps passer. »

Héhé .Franck marque un point.

« Moi non plus. Ta compagnie est très agréable, j’aurais volontiers prolongé mais ce ne serait pas sérieux. Par contre on pourrait se revoir si tu le désires. Et cette fois, c’est moi qui te préparerai le souper.  Dis-je.

-          Oui, répond-t-elle très rapidement.

-          Quand ça ?

-          Demain ? Si tu n’as rien de prévu évidement.

-          Non, non je suis libre. C’est parfait. Donc demain, 19 heures chez moi. »

 

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Commentaires
E
encore une fois, tu décris tellement bien la scène, que j'ai l'impression d'être cachée dans ta poche pour assister à cette rencontre.
P
Tes mots me touchent toujours autant. Tu étais si amoureux d'elle, mais tu es tombé fou de ses mots avant son physique si je comprends bien? <br /> <br /> <br /> <br /> Hé oui, cette femme te faisait autant d'effet que tu lui en faisais. C'est adorable même et trop mignon. <br /> <br /> Je suis et resterai romantique !
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